Un élégant casaquin
Un “allégement” qui suscitait le scandale auprès des esprits conservateurs de l’époque et n’était pas toléré à la Cour de Versailles où le cérémonial de l’Etiquette interdisait tout aménagement vestimentaire non protocolaire.
Une mode jugée provocante
Dans ses mémoires, le baron de Frénilly évoque ”le cri général qui se fit entendre contre les pierrots”. Lesquels avec ”l’espèce de petite queue d’oiseau retroussée au bas du corset affichaient une révolte ouverte à la fois contre les queues (traînes) et contre les paniers”.
Il pointe avec beaucoup de justesse les particularités de cette mode, et sans doute les raisons de son succès, en notant : ”en panier, la cocotte la plus légère avait l’air d’une matrone, en pierrot, la plus sévère matrone eut l’air d’une linotte”.
Des sources d’inspiration nouvelles
Tels le Cabinet des modes (périodique de mode français édité de 1785 à 1786) ou le Journal des dames, (créé dès 1759 ) lequel relève ”la multiplicité des modes qui se rivalisent, se croisent, se succèdent avec la rapidité des éclairs …” et la difficulté de rendre compte de toutes les nouveautés.
Une influence d’origine populaire
L’une des caractéristiques de la mode de la fin de l’Ancien Régime est le raccourcissement généralisé des jupes, dégageant la cheville et remontées sur les hanches.
Par ailleurs, l’habillement ayant souvent pour origine les boutiques des fripiers ou des ”revendeurs à la toilette”, les robes n’avaient pas toujours une longueur adaptée à leur nouvelle propriétaire.
Il fallait procéder à des ”ajustements”, soit en les raccourcissant ou en remontant l’excédent par différents moyens.
L’un des plus astucieux consistait à glisser la jupe à travers les fentes de coté, d’où un aspect renflé sur les hanches qui avait aussi l’avantage d’imiter la silhouette des robes « à paniers » des aristocrates.
Ce changement d’apparence était particulièrement remarquable dans les milieux urbains où les diverses classes se côtoyaient et où la mode venait puiser ses diverses inspirations.
Les autorités morales condamnaient ces évolutions, estimant la stabilité vestimentaire comme essentielle à l’équilibre de la société et l’effacement des frontières entre vêtement aristocratique et populaire comme un danger.
L’influence du personnel de maison
Il n’est pas inutile de rappeler l’influence qu’avait le personnel des grandes maisons bourgeoises sur la diffusion des nouveautés vestimentaires. Couramment rétribués par le don de pièces de costumes plus ou moins usagées ou passées de mode, ils procédaient à leur revente auprès des fripiers, mettant ainsi sur le marché des articles non disponibles autrement.
A propos des chambrières et autres servantes de grandes maisons, Mme Rolandnote que presque toutes s’habillent ”des dépouilles encore fraîches de leurs maîtresses qui prêtaient à leur parure une richesse que l’honnête bourgeoise s’interdisait”.
A la pointe de la tendance
Cette configuration est héritée de la robe dite ”à la polonaise”, particulièrement en vogue dans les années 1780. Elle se caractérisait par un manteau de robe s’ouvrant en deux parties depuis la poitrine, pour s’évaser ensuite sur les cotés en rejoignant la jupe.
Agencement conservé par le ”Pierrot”, version raccourci de la polonaise et où se retrouvent les deux pointes recouvrant en partie les compères.
Des compères à la page
La partie basse des compères est découpée en languettes courtes venant s’appliquer sur le haut de la jupe, selon un modèle qui semble avoir connu une faveur assez longue, si l’on en croit les nombreux exemples datant de cette période.
Des manches à”l’envers”
Les manches du casaquin mulhousien sont de type 3/4, avec une forme arrondie. Configuration spécifique aux tenues de l’Ancien Régime, due à la posture corporelle donnée par le port du corset, lequel obligeait à se tenir les épaules rejetées en arrière, avec les omoplates très rapprochées.
D’où l’ouverture en trapèze du décolleté et le maintien des bras en position demi pliée.
Une observation plus attentive permet de remarquer que la couture des manches est elle-même dans une position inhabituelle puisque placée non pas sous mais sur l’avant du bras. Emplacement surprenant mais courant à l’époque et qui découle directement de la position des bras imposée par le corset.
Les couturières débutantes, faisant de la reconstitution de costumes anciens, sont parfois désorientées par cette configuration, ne comprenant pas les raisons de ces manches apparemment disposées ”à l’envers”. Ce qui correspond pas avec la tradition enseignée dans les écoles de couture à partir du 19è siècle, période où les corsets ayant changé de forme, l’attitude corporelle et l’allure des manches se trouvèrent également modifiées.
A suivre …
Remerciements à l’équipe du Musée Historique de Mulhouse pour son accueil et l’aide apportée à la réalisation de cette page.
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Documentation
- Mémoires du baron de Frénilly – Souvenirs d’un ultra royaliste – Histoire en mémoire – Editions Perrin – 1987
- Mémoires de Mme Roland, suivis des notices historiques sur la révolution: du portrait et anecdotes et des derniers écrits et dernières pensées – Books Google
- Babeau Albert Arsène, 1835-1913 – Les artisans et les domestiques d’autrefois – 1886
- Daniel Roche – La culture des apparences – une histoire du vêtement XVIIè-XVIIIè siecle – Collection Histoire – Editions Fayard – 1989
- François-Marie Grau Histoire du costume – Collection Que sais-je ? – Éditions Presses Universitaires de France – 2007
- Michelle Sapori – Rose Bertin, Couturière de Marie-Antoinette – Collection « Les Métiers de Versailles » – Editions Perrin – 2010
Liens
http://lecostumeatraverslessiecles.chez-alice.fr/Costumes/XVIIIe/1774-1789_feminin.htm
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